Rejoignez-nous pour une conversation avec Giuseppe Biondi Zoccai, un cardiologue qui a surmonté son combat personnel contre le tabagisme grâce au vapotage et qui est aujourd’hui un fervent défenseur de la réduction des risques liés au tabac. En tant que secrétaire général de SCOHRE et membre de la Société Européenne de Cardiologie (ESC), Giuseppe Biondi Zoccai offre une vision à multiples facettes de la lutte contre le tabagisme, mêlant expérience personnelle et expertise professionnelle.
Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis cardiologue et j’ai moi-même été fumeur. J’ai réussi à arrêter de fumer en utilisant des dispositifs tels que les vapes lorsqu’elles ont été introduites il y a 8 ans.
Je fais également partie d’une association de cardiologie de premier plan, la Société Européenne de Cardiologie (ESC), et je suis le secrétaire général de SCOHRE, une association scientifique internationale d’experts indépendants sur le contrôle du tabagisme et la réduction des risques.
Bien que je ne sois pas directement spécialisé dans le tabagisme ou la dépendance, j’ai acquis une bonne perspective multidimensionnelle en passant du statut de fumeur à celui d’ancien fumeur, puis de clinicien et de chercheur visant à lutter contre le tabagisme. Cela me permet d’avoir une perspective plus globale du tabagisme et des moyens de le combattre.
Quelle est votre vision de la nicotine et de son utilisation comme outil de réduction des risques liés au tabac ?
La nicotine est un bon allié temporaire contre le tabagisme par combustion.
Toute cigarette contient des centaines de produits toxiques en soi et la combustion génère une pléthore de produits risqués menant à des maladies. Pour moi, le problème est que fumer est devenu un style de vie et l’objectif est donc de briser les habitudes, ainsi les nouveaux produits contenant de la nicotine sont un très bon moyen de remettre en question ces habitudes.
En effet, la nicotine dans les dispositifs de vapotage est utile pour arrêter de fumer par combustion. En réalité, si l’on tente de passer du tabagisme par combustion à une autre forme de tabagisme sans transition, il est probable que cela conduise à un manque et donc à un retour au tabagisme par combustion.
Je pense que l’aspect essentiel des dispositifs anti tabac contenant de la nicotine est de créer un lien entre l’utilisation du dispositif pour obtenir de la nicotine et le maintien des rituels liés à cette habitude, sans la partie combustion. De cette façon, les gens finiront par abandonner l’outil de tabagisme par combustion car ils peuvent maintenir leurs rituels d’une autre façon.
Cependant, en tant que clinicien, je ne peux pas défendre l’utilisation de ces produits pour toujours. Je recommande plutôt de les considérer comme un outil provisoire pour changer les habitudes.
Je recommande généralement à mes patients une approche par étapes. La première consiste, par exemple, à passer du tabagisme de combustion à un substitut nicotinique pendant 6 mois, puis à essayer pendant 3 mois un dispositif exempt de nicotine et, enfin, à tout arrêter.
Pouvez-vous discuter des différences d’efficacité de la nicotine selon les différentes méthodes de livraison ?
Selon les différents appareils utilisés, il existe une grande hétérogénéité.
Ce n’est pas mon domaine d’expertise. Cependant, je pense que nous avons besoin de nicotine pour nous débarrasser de l’habitude de fumer par combustion et que la nicotine doit être adaptée pour atteindre cet objectif. Nous devons également essayer d’éviter les doubles utilisateurs, c’est-à-dire les personnes qui utilisent à la fois des dispositifs de combustion et de vapotage, car ils sont moins susceptibles d’arrêter de fumer.
Quel rôle les professionnels de la santé/les défenseurs peuvent-ils jouer dans la promotion de la nicotine comme alternative, compte tenu de la controverse entourant leur nature addictive ?
En Italie, le principe est de ne pas fournir directement d’appareils à fumer avec ou sans nicotine, alors que dans d’autres pays, des appareils de vapotage avec ou sans nicotine ont été distribués.
À mon avis, fournir ces types de dispositifs aux patients pourrait être un bon début, mais il est peu probable que le système italien le fasse notamment pour des raisons budgétaires.
Les dispositifs sans nicotine seront moins susceptibles d’aider les patients à surmonter l’addiction, mais ils pourraient être utiles pour convaincre les sceptiques que les cigarettes électroniques sont sûres et qu’elles peuvent être données gratuitement aux patients.
Cependant, le type de dispositifs variera en fonction des patients. En effet, pour une personne fumant 6 cigarettes par jour et ayant donc un degré de dépendance limité, un dispositif de vapotage sans nicotine pourrait être efficace, tandis que pour une personne fumant 20 cigarettes par jour ou plus, un dispositif avec nicotine sera nécessaire pour briser son rituel.
Les nicopouches pourraient également être utilisés dans ces perspectives de réduction des risques. Ils présentent une variabilité et une complexité de prescription importantes, mais ils peuvent être efficaces.
Une chose à retenir : les alternatives ne doivent pas être diabolisées et la meilleure façon de promouvoir ces dispositifs est d’en promouvoir l’usage temporaire.
Comment les sachets de nicotine peuvent-ils être intégrés plus efficacement dans les programmes d’arrêt du tabac ?
Le système italien est très limité en termes de ressources. Par conséquent, il n’est pas en faveur de la gratuité. Un tel processus nécessiterait une collaboration avec des entreprises privées, ce qui est improbable. Des dispositifs sans nicotine pourraient être approuvés, mais cela reste peu probable. Toutefois, cela pourrait se faire dans d’autres pays européens comme le Royaume-Uni et les Pays-Bas.