L’arrêt du tabac est un défi majeur de santé publique, souvent perçu comme un combat solitaire, répétitif et frustrant. Or, les technologies immersives, notamment la réalité augmentée (RA) et les serious games, s’invitent désormais dans les stratégies de sevrage nicotinique. Et si jouer à un jeu aidait vraiment à décrocher de la cigarette ? Ce concept innovant, encore en développement, pourrait devenir un complément précieux aux substituts classiques, notamment les alternatives sans fumée comme les sachets de nicotine. On fait le point sur cette approche hybride entre neurosciences, ludification et soutien au sevrage.
Serious games et addiction : une alliance prometteuse
Les serious games, ou jeux sérieux, sont conçus pour divertir tout en atteignant un objectif éducatif ou thérapeutique. Depuis plusieurs années, ils sont utilisés pour :
- Accompagner des traitements médicaux (phobies, troubles alimentaires, rééducation)
- Améliorer l’adhésion aux soins chez les jeunes
- Modifier les comportements à risque (alcool, drogues, jeux d’argent)
Le domaine du tabac n’échappe pas à cette tendance. Certains jeux numériques, en réalité virtuelle ou augmentée, visent à reprogrammer la relation du fumeur à la nicotine, en combinant immersion émotionnelle, feedback instantané et renforcement positif.
Comment la réalité augmentée peut-elle intervenir ?
La réalité augmentée (RA) superpose des éléments virtuels au monde réel via un smartphone, une tablette ou des lunettes connectées. Cette technologie peut être mobilisée dans des situations clés du sevrage, par exemple :
- Lorsqu’un utilisateur scanne un paquet de cigarettes et qu’une alerte visuelle ou sonore apparaît pour décourager l’envie
- Quand une application géolocalise un lieu à risque (bar, terrasse, etc.) et propose en RA une aide personnalisée en temps réel
- Ou encore à travers des mini-jeux dans l’environnement quotidien, où récompenser un choix sans nicotine devient un défi stimulant
Les premières expérimentations montrent que la gamification de l’arrêt du tabac favorise l’implication active, réduit la sensation de frustration et crée une routine positive, parfois plus efficace que les rappels classiques ou les applications passives.
Exemples de projets et prototypes
Plusieurs programmes pilotes ont vu le jour ces dernières années :
SmokeFree 3D : une application mêlant RA et exercices respiratoires, utilisée en complément des substituts nicotiniques
QuitAR : un concept expérimental testé au Canada, avec des avatars virtuels qui accompagnent l’utilisateur dans les moments de craving
Play2Quit : projet de l’Union européenne combinant auto-évaluation, messages cognitifs et interactions gamifiées
Ces projets, bien que souvent encore en phase de test, suggèrent que l’approche multisensorielle et ludique permet de mieux gérer les pics de dépendance psychologique, notamment dans les premières semaines du sevrage.
Complémentarité avec les sachets de nicotine
Les sachets de nicotine, sans fumée ni vapeur, offrent un apport contrôlé et rapide en nicotine, permettant de gérer les symptômes physiques du manque. En parallèle, les serious games en RA agissent sur le plan cognitif et comportemental, en occupant l’esprit, en renforçant la motivation et en associant le sevrage à une expérience valorisante.
Ce double levier, à la fois pharmacologique et psychologique, est aujourd’hui considéré par de nombreux experts comme un modèle d’accompagnement efficace, notamment pour les fumeurs réfractaires aux méthodes classiques.
Utiliser un sachet de nicotine pendant qu’on progresse dans une mission ludique anti-tabac n’est pas un paradoxe, mais une synergie intelligente entre produit de substitution et technologie comportementale.
Limites et perspectives
- La réalité augmentée appliquée au sevrage tabagique en est encore à ses débuts. Parmi les freins identifiés :
- Un accès inégal aux outils numériques selon les populations
- Le manque de validation scientifique sur la durée de l’effet
- Une adhésion variable selon le profil psychologique des utilisateurs
Néanmoins, les acteurs de la santé et les start-ups investissent de plus en plus ce champ. Des partenariats émergent entre tabacologues, développeurs de jeux et fabricants de substituts nicotiniques pour créer des programmes hybrides intégrés dans le quotidien.
Une nouvelle arme contre la rechute ?
L’avenir du sevrage pourrait bien passer par cette fusion entre sciences comportementales et design interactif. En complément des approches médicales et des produits sans fumée, les outils immersifs apportent une dimension émotionnelle souvent absente des méthodes classiques.
Ils rendent visibles les progrès, transforment la difficulté en défi, et redonnent au fumeur en transition un sentiment de contrôle actif sur son parcours. C’est précisément ce dont manquent de nombreuses tentatives d’arrêt : une implication constante et engageante.
Sources :





